Depuis notre indépendance, nous n’aurons pas connu autre chose que la violence de l’État. Comme Antoine Kourouma l’a si bien remarqué ce matin d’une certaine manière, ces dix dernières années, nous n’avons pas connu un mois entier de répit.
Des centaines de familles sur toute l’étendue de notre territoire ont pleuré un mort, assassiné systématiquement par nos forces de l’ordre.
Toutes les luttes qui ont été menées n’ont servi à rien. Sékou Touré a foulé au pied les sacrifices de l’indépendance. Lansana Conté a marché sur les trucidés et des rescapés du camp Boiro, les cadavres des événements de 2006/2007. Alpha Condé a craché sur meurtres et les viols du 28 septembre 2009. À l’arrivée, le monde a continué à tourner.
Pendant que certains guinéens crient leurs deuils, nous autres avons continué à vaquer à nos occupations. Puisque ce n’est notre fils, notre frère, notre oncle ou notre cousin qui a été fauché par une balle, ce n’est pas notre problème.
Dans le secret de nos maisons, de nos chuchotements et des murs de notre compte Facebook, les gens reconnaissent, volontiers, que tout va mal, mais personne ne bouge le petit doigt. J’en fait personnellement l’amère expérience avec mon affaire judiciaire.
J’ai pu à plusieurs reprises discuter de mon dossier avec des amis de tous les milieux que je fréquentais en Guinée, jusqu’aux hauts cadres de l’administration, y compris des ministres.
Chacun interlocuteur n’a pas hésité à me dire à quel point cette situation est injuste. Comprennez bien qu’un ministre de la République, appartenant à un gouvernement censé protéger ses citoyens, reconnaît une injustice de l’État qu’il sert et il laisse courir. Peut-être n’ont-ils pas fait quelque chose parce qu’ils n’ont pas réussi à me retourner, me rallier leur cause. Bref!
Revenons à la situation générale de notre pays.
Comment Alpha Condé a-t-il réussi à appauvrir et à diviser les guinéens sans que les guinéens ne se révoltent? Comment Alpha Condé a pu faire tuer des centaines de jeunes guinéens sans que le pays entier ne s’oppose? Comment Alpha Condé a pu organiser 4 élections au mépris de nos lois sans que la Guinée ne se rebelle? Comment Alpha Condé a-t-il pu imposer une Constitution fallacieuse et promulguée la même Constitution en l’ayant amputé, s’engager dans un troisième mandat et une présidence à vie sans que la Guinée ne se soulève?
1- Parce que la majorité des guinéens sont avec lui. Sinon une minorité ne peut imposer sa volonté à la majorité. Sinon cette majorité qui se serait pas avec lui ne peut pas accepter de se laisser marcher dessus depuis dix ans sans broncher. C’est cela en tout cas l’arrogante réponse que nous opposent le RPG et toute sa clique de militants, responsables, ministres et hauts cadres.
2- Le guinéen n’a pas le sens de l’intérêt collectif. C’est chacun pour soi, Dieu pour les cons… qui croient que leur combat individuel peut changer notre destin. Les jeunes de l’axe tombent depuis dix ans avec la stupide conviction que nous les aiderons. Depuis un certain nombre d’années, ils ont été à la pointe de toutes luttes pour la liberté et la démocratie chez nous. C’est à croire qu’ils sont les seuls à souffrir.
Et s’ils arrêtent leur mobilisation, comment serait notre pays. Peut-être qu’il faudrait justement qu’ils s’arrêtent. Et quand les sangsues nous auront, tous, suffisamment sucer leur sang, peut-être que nous les aiderons. Et si on ne se bouge pas, c’est qu’on aime ça. Parce qu’au lieu de leu apporter du soutien en grossissant leurs rangs, nous disons qu’ils sont cons de tout le temps manifester et de se laisser abattre comme du bétail.
Des cadavres qui traversent la ville chaque fois en cortège funèbre et les usagers de la route et les
riverains regardent ça comme un spectacle. Après le passage de la procession, les uns reprennent leurs bagnoles et les autres retournent à leurs marmites et cigarettes. Nous continuons à bouffer notre riz, à pisser notre bière, notre coca et notre eau de puits ou de Coyah puisque la SEG est sèche, à chier notre merde infecte, à baiser nos mecs/meufs dans nos villas cossues, nos abris piteux, nos hôtels 4 étoiles, nos motels miteux.
Notre Guinée est la patrie du destin individuel intelligent et de la destinée collective stupide. Et ceux qui gouvernent et ceux qui aspirent à gouverner savent bien que tant qu’ils graissent une minorité, ils peuvent laisser la majorité rouiller. Ils sont tous habitués à régner en maître. Ce que font ceux dirigent aujourd’hui, c’est ce qu’ont fait ceux qui dirigeaient hier et c’est ce que feront ceux qui dirigeront, à en croire notre salope de vie.
Parce que nous sommes un peuple docile, résigné, prêt à l’écarter chaque fois qu’on nous l’ordonne. Même si c’est un peu groupe de prostitués qui nous le réclament. Les dirigeants savent qu’il suffit d’une poignée d’imbéciles pour nous soumettre. Et c’est à cette minorité qu’ils donneront le fouet pour nous flageller. Parce qu’évidemment c’est toujours plus facile de satisfaire un-e partenaire qu’une cohorte de nymphomane.
En regardant ceux qui sont dans le palais et ceux qui veulent le palais, on se rend compte qu’ils connaissent le palais. Et tous savent que c’est doux. Et quand c’est doux, c’est doux. On est prêt à tout pour rester dans le doux et prêt à tout pour revenir dans le doux, parce que quand c’est doux, c’est doux.
Y a pas de raison de faire goûter à quelqu’un qui se doute bien que c’est doux, parce qu’il se rendra compte que c’est vraiment doux et il s’incrustera, s’installera, se sédentarisera, parce que quand c’est doux, c’est doux… avec ou sans capotes.
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