Après la reprise des combats dans le nord, onze ans après la guerre civile de 2012 et huit ans après la signature d’un accord de paix, de nombreux partis politiques maliens, de différentes sensibilités, expriment leur inquiétude et lancent des appels pour tenter, tant qu’il en est peut-être encore temps, de sauver la paix. Parmi les personnalités politiques qui s’expriment sur cette reprise des combats dans le nord du Mali, Oumar Mariko. Le président du parti Sadi, en exil, sort exceptionnellement de sa réserve. Entretien.
umar Mariko est un militant historique de la souveraineté du Mali, qui avait soutenu le coup d’État militaire de 2012. Le président du parti Sadi, en exil, attribue cette fois la responsabilité de la guerre aux autorités de transition. Il appelle à la fin des combats et au dialogue pour sauver l’accord de paix de 2015.
RFI : Oumar Mariko, comment analysez-vous cette reprise des combats ?
Oumar Mariko : Nous assistons avec les différentes attaques à un carnage systématique entre l’armée et les forces de l’ex-rébellion. D’autre part, il ne faut pas passer sous silence le mouvement jihadiste qui en profite et qui continue ses actions. Et également le groupe Wagner qui continue aussi de massacrer la population civile. La question qu’on peut se poser est de savoir : pour quelles fins et pour quel objectif ?
Pourquoi en est-on arrivé là ? Et surtout, le dialogue est-il encore possible avec les groupes armés du nord ?
Les différents régimes successifs, depuis la signature du Pacte national jusqu’à l’accord d’Alger, se sont mis dans une position de mi-paix, mi-guerre, mais en réalité de guerre larvée qui a fait beaucoup de morts dans les rangs de l’armée. Et aujourd’hui, avec la junte actuelle qui gère la transition, c’est la guerre déclarée.
À mon avis, cette guerre est nuisible et inutile pour la simple raison que le mouvement de la rébellion ne pose pas le problème de l’intégrité du territoire. Or, l’armée est là pour la défense de l’intégrité territoriale !
Étant donné que la revendication de l’intégrité territoriale n’est plus de mise – celle-là même qui a mobilisé l’ensemble du peuple malien contre le mouvement de la rébellion [en 2012, NDLR] – à mon avis, tout doit se jouer d’un point de vue purement et simplement politique. La transition devrait pouvoir permettre la gestion politique de cette question du nord.
Donc, l’accord de paix n’est pas enterré et vous pensez qu’on peut encore y revenir ?
C’est difficile à dire. L’appel pourtant que je peux faire, c’est de dire simplement qu’il faut que les forces armées, qu’elles soient de la rébellion, qu’elles soient aussi de l’armée régulière, arrêtent de s’entretuer. Parce que ces deux forces armées ne sont pas responsables du déclenchement de la guerre. Le déclenchement de la guerre vient de la junte militaire, et c’est à la junte de se remettre en question et d’arrêter le processus de guerre dans lequel il a engagé tout un peuple.
Ça, ce sont les appels que vous adressez aux forces combattantes, de l’armée et du CSP, ainsi qu’aux autorités de transition. Et à l’endroit du peuple malien ?
À l’endroit du peuple malien, c’est de dire simplement qu’aujourd’hui, il y a beaucoup de Maliens qui demandent la guerre, et il y a beaucoup de Maliens qui ne veulent pas de la guerre. Et ce sont les plus nombreux ! Donc que le camp de la paix donne de la voix pour imposer la paix à la junte militaire, qui est responsable du déclenchement de cette guerre-là, en lieu et place d’une solution politique de gestion des revendications de la CMA.
RFI
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