Norbert Zongo, journaliste emblématique du Burkina Faso et directeur de l’hebdomadaire L’Indépendant , a été assassiné dans des circonstances tragiques le 13 décembre 1998. Il était un fervent défenseur des droits humains, connu pour son journalisme d’investigation incisif et sa dénonciation de la corruption et des abus de pouvoir dans le régime de Blaise Compaoré.
•Les circonstances de sa mort.
Norbert Zongo et trois de ses compagnons ont été retrouvés morts dans un véhicule calciné sur la route dépendant de Sapouy à Ouagadougou. Le journaliste enquêtait alors sur des affaires sensibles, notamment sur la mort suspecte de David Ouédraogo, chauffeur de François Compaoré, frère de Blaise Compaoré. David Ouédraogo aurait été torturé à mort pour un vol présumé, ce qui a conduit Norbert Zongo à creuser davantage dans cette affaire. Cette enquête pourrait avoir été le mobile de son assassinat.
Une enquête initiale a conclu à un crime politique. En 2001, une commission d’enquête indépendante a identifié six suspects principaux liés au Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP), mais aucune poursuite concrète n’a été engagée à l’époque. L’affaire a stagné pendant des années, notamment en raison de l’impunité qui régnait sous le régime de Blaise Compaoré.
•Le rôle de François Compaoré.
François Compaoré, surnommé « le petit président » en raison de son influence dans l’entourage du chef de l’État, est accusé d’avoir commandité l’assassinat de Norbert Zongo pour protéger ses intérêts et éviter que des révélations compromettantes ne soient publiées . En 2017, le Burkina Faso a émis un mandat d’arrêt international contre lui. Cependant, il vit en France, où il bénéficie de recours judiciaires qui retardent son extradition.
•Justice : une attente interminable.
Malgré la chute de Blaise Compaoré en 2014, l’affaire Zongo n’a pas encore été jugée. La lenteur judiciaire, les obstacles diplomatiques liés à l’extradition de François Compaoré, et la complexité du dossier contribuent à prolonger l’impunité.
•Y a-t-il un espoir ?
L’évolution judiciaire : En 2022, Blaise Compaoré a été condamné à perpétuité pour son rôle dans l’assassinat de Thomas Sankara, ce qui montre une volonté du Burkina Faso de perpétuer les crimes du passé. Cela pourrait ouvrir la voie à un procès équitable pour Norbert Zongo.
•Extradition : La France a donné un avis favorable à l’extradition de François Compaoré en 2018, mais des recours juridiques ont retardé son transfert. Si ces obstacles sont relevés, il pourrait être jugé au Burkina Faso.
▪︎Pression populaire et internationale.
L’affaire reste emblématique pour la société civile burkinabè et les organisations de défense des droits humains. Cette mobilisation maintient la pression sur les autorités.
La quête de justice pour Norbert Zongo est lente et complexe, mais pas désespérée. Si des obstacles restent à surmonter, notamment l’extradition de François Compaoré, la chute du régime Compaoré a permis des avancées. Avec la volonté politique, le soutien international et la résilience des proches et des défenseurs de la justice, l’espoir demeure que cette affaire puisse un jour aboutir à une justice complète.
Par Aboubacar SAKHO.
Juriste-journaliste