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L’Atlantique, le cimetière silencieux de la jeunesse africaine

Ils avaient des rêves, des espoirs, des projets. Ils cherchaient un avenir meilleur, loin des souffrances et des privations de leur quotidien. Pourtant, plus de dix mille jeunes africains ont péri dans les eaux sombres de l’océan Atlantique en 2024, selon des rapports alarmants relayés par les médias internationaux. Ces tragédies à répétition dessinent les contours d’un phénomène de société bouleversant, révélateur des failles profondes qui gangrènent le continent africain.

 

▪︎L’odyssée mortelle : entre espoir et désillusion

Les embarcations de fortune, souvent surchargées et mal équipées, deviennent des cercueils flottants. Des milliers de jeunes, originaires de pays tels que le Sénégal, la Guinée, ou encore le Nigeria, se lancent dans des traversées désespérées, bravant des vagues déchaînées et des courants implacables. Beaucoup ne savent même pas nager, mais l’espoir d’atteindre les côtes européennes suffit à alimenter leur courage insensé.

L’itinéraire le plus meurtrier est celui qui relie l’Afrique de l’Ouest aux îles Canaries, porte d’entrée vers l’Europe. Cette route, surnommée « la route des damnés », a englouti des milliers de vies cette année.

▪︎Les causes profondes de l’exode

Pourquoi ces jeunes quittent-ils leur terre natale, au péril de leur vie ? La réponse réside dans un mélange complexe de facteurs économiques, sociaux et politiques :

▪︎Pauvreté endémique : Les inégalités criantes et le manque d’opportunités économiques poussent les jeunes à chercher ailleurs un avenir qu’ils jugent inaccessible chez eux.

▪︎Conflits et instabilité : Les guerres civiles, la montée des groupes terroristes et la répression politique forcent des milliers de personnes à fuir leur pays.

▪︎Manque de perspectives : L’absence de politiques publiques efficaces pour l’emploi et la formation des jeunes alimente leur désespoir.

▪︎Le mirage européen : Alimenté par les réseaux sociaux et les récits embellis des migrants ayant réussi, le rêve d’une meilleure vie en Europe reste puissant.

▪︎Le rôle des passeurs : profiteurs de la détresse

Dans cette tragédie humaine, les passeurs jouent un rôle central. Ces trafiquants exploitent la vulnérabilité des candidats à la migration, leur promettant une traversée sans encombre contre des sommes exorbitantes.

Mais une fois en mer, ces jeunes découvrent l’ampleur de l’arnaque : moteurs défectueux, absence de vivres et de gilets de sauvetage. Les drames s’enchaînent, alimentant un cercle vicieux où des familles entières s’endettent pour financer une traversée qui, bien souvent, se termine au fond de l’océan.

▪︎Un silence coupable ?

Face à cette hécatombe, le silence des gouvernements africains et européens est assuré. Les politiques migratoires restrictives de l’Europe contribuent à fermer les voies légales d’immigration, poussant les jeunes à emprunter des chemins périlleux. De leur côté, les États africains peinent à offrir des alternatives viables à leur jeunesse, piégée entre la résignation et le désir d’évasion.

▪︎Un appel à l’action

Le drame de la migration clandestine interpelle sur l’urgence d’agir à tous les niveaux :

▪︎Investir dans les opportunités locales : Les gouvernements africains doivent mettre en œuvre des politiques inclusives favorisant l’emploi des jeunes et leur insertion professionnelle.

▪︎Renforcer la lutte contre les réseaux de passeurs : La coopération internationale est essentielle pour démanteler ces réseaux criminels qui prospèrent sur la misère humaine.

▪︎Créer des voies migratoires légales : L’Europe doit réviser ses politiques pour offrir des alternatives sûres et légales aux candidats à l’immigration.

▪︎Le cri d’une jeunesse sacrifiée.

En 2024, l’Océan Atlantique est devenu le théâtre de drames incommensurables, emportant avec lui des générations entières de jeunes Africains. Ces vies perdues nous rappellent que chaque naufrage est un échec collectif, un miroir impitoyable des injustices et des désespoirs qui sévissent sur notre planète.

Si rien n’est fait, l’Atlantique continue de pleurer des larmes salées pour ces âmes égarées, transformant le rêve d’un ailleurs meilleur en cauchemar éternel.

 

Par Aboubacar SAKHO 

Juriste-journaliste