Information libre et instantanée

Cellou Dalein Diallo, un lion en exil à la De Gaulle

L’histoire est têtue, et les grands hommes émergent souvent des épreuves les plus difficiles. En effet, c’est le cas de Cellou Dalein Diallo, un « premier de la classe » révélé par les multiples scrutins électoraux organisés en Guinée depuis 2010. Leader incontesté de l’opposition, il a été contraint à l’exil après la destruction de sa résidence à Dixinn Port en 2022, dans un climat marqué par une répression politique sans précédent.

Or, l’histoire politique mondiale regorge de figures ayant été forcées à l’exil avant de revenir en triomphe. À titre d’exemple, Charles de Gaulle a fui la France pendant l’occupation nazie avant de revenir en libérateur en 1944. De même, Alassane Ouattara avait fait trois ans d’exil avant de rentrer en Côte d’Ivoire en 2006.

Dans cette logique, Cellou Dalein Diallo s’inscrit dans cette lignée. Autrement dit, loin d’être un cas isolé, son exil semble être non pas une fuite, mais une stratégie de survie et de repositionnement politique face à un régime répressif.

Une méfiance légitime envers la justice guinéenne

En premier lieu, l’un des principaux arguments avancés par Cellou Dalein Diallo pour justifier son exil est son manque de confiance en la justice guinéenne, qu’il juge instrumentalisée par la junte. Concrètement, l’affaire Air Guinée, vieille de plus de deux décennies, est remise sur la table par les autorités pour tenter de l’impliquer dans un prétendu détournement de fonds. Or, plusieurs acteurs du dossier ont déjà affirmé qu’il n’en était pas responsable.

D’ailleurs, cette instrumentalisation de la justice contre les opposants politiques est un phénomène bien connu en Guinée. À ce propos, sous Alpha Condé, de nombreuses figures de l’opposition ont été arrêtées sur des bases douteuses. À l’échelle internationale, l’histoire offre un parallèle frappant : Napoléon III, exilé à Londres après le coup d’État de 1851, n’avait aucune garantie d’un procès équitable sous le régime en place. Son retour n’a été possible qu’avec l’évolution du contexte politique.

Un lion, roi des urnes, face à une forêt hostile

Cela étant dit, Cellou Dalein Diallo demeure le roi des urnes en Guinée. C’est un fait reconnu, y compris par ses adversaires. Toutefois, depuis la prise du pouvoir par le CNRD en septembre 2021, le pays traverse une période de répression politique intense : arrestations d’opposants, interdictions de manifestations, musellement des médias… Dans ces conditions, son retour apparaît comme une prise de risque majeure.

Cependant, ce n’est pas une situation inédite en Guinée et ailleurs. L’ex président Alpha Condé s’était exilé à sa sortie de prison. Il n’est rentré au pays qu’à la prise du pouvoir par le CNDD du Capitaine Moussa Dadis Camara, en décembre 2008. Ainsi, comme lui, Cellou Dalein Diallo sait que le moment du retour est un élément clé de la conquête du pouvoir.

Une stratégie de retour bien pensée

Contrairement aux accusations de fuite lancées par ses détracteurs, Cellou Dalein Diallo a toujours affirmé qu’il reviendra en Guinée dès que les conditions le permettront. Autrement dit, son objectif n’est pas de se précipiter dans un piège, mais de préparer un retour stratégique qui lui permettrait de mobiliser son électorat et de peser sur la transition politique.

En ce sens, l’exemple de Félix Houphouët-Boigny en Côte d’Ivoire est particulièrement instructif. Exilé en France dans les années 1940, il est revenu après la décolonisation pour devenir le premier président ivoirien. Son retour avait été soigneusement préparé, ce qui lui a permis d’accéder au pouvoir avec une forte légitimité.

Un lion recule toujours pour mieux sauter

De fait, pour ses partisans, l’exil de Cellou Dalein Diallo n’est pas une retraite définitive, mais une étape stratégique, un passage obligé avant un retour triomphal. En revanche, pour ses adversaires, il devrait rentrer immédiatement et affronter la justice. Toutefois, si l’histoire nous enseigne une chose, c’est que le retour d’un exilé politique ne dépend pas d’un simple désir personnel, mais d’un timing précis et d’un contexte favorable.

Dans tous les cas, la véritable question n’est pas de savoir si Cellou Dalein Diallo reviendra, mais plutôt quand et dans quelles conditions. Si son retour se fait en homme libre et en position de force, il pourrait bien suivre les traces des plus grands leaders qui ont su transformer leur exil en tremplin vers le pouvoir.

 

Mamadou Alpha BAH & Laye TRAORÉ

Source:Guinafnews.org