Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi dans les rues de plusieurs villes du Burkina Faso, dont la capitale Ouagadougou, contre « l’aggravation » de la situation sécuritaire, réclamant une réponse aux attaques jihadistes de plus en plus meurtrières.
« Non à l’insécurité grandissante », « Non à l’abandon des populations », « Non aux attaques sans fin », « Y-a-t-il encore un président au Burkina Faso ? », ont scandé les manifestants dans le centre de Ouagadougou, en brandissant des drapeaux de leur pays.
Cette marche, à laquelle avaient également appelé plusieurs organisations de la société civile, était la première organisée par l’opposition depuis la réélection du président Roch Marc Christian Kaboré en 2020.
« Aujourd’hui, de Dori à Kampti, de Dedougou à Diebougou, de Ouagadougou à Diapaga, les populations ont manifesté pour protester contre l’aggravation de la situation sécuritaire », a déclaré le chef de file de l’opposition, Eddie Komboïgo, se réjouissant d’une « mobilisation gigantesque à travers le pays malgré les appels au boycott par le pouvoir ».
Des manifestations ont également eu lieu à Bobo-Dioulasso (ouest), deuxième ville du pays, mais aussi à Ouahigouya, chef-lieu de la région du Nord, à Kaya, chef-lieu de la région du Centre-Nord et à Fada N’Gourma, chef-lieu de la région de l’Est, ces trois dernières régions étant parmi les plus frappées par les jihadistes.
Le président Kaboré avait demandé aux organisateurs de « surseoir » aux marches de samedi. D’autres manifestations sont prévues dimanche dans d’autres villes.
« Pendant le premier mandat du président Kaboré (de 2015 à 2020, ndlr), on a dénombré officiellement plus de 1.300 morts et 1,2 million de déplacés internes », a rappelé M. Komboïgo, affirmant qu’il « est à craindre que le second mandat ne soit pire que le premier car depuis le début de l’année, nous en sommes à plus de 300 morts ».
Le Burkina Faso est confronté depuis 2015 à des attaques de plus en plus fréquentes et meurtrières de formations jihadistes, dont le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (affilié à Al-Qaïda) et le groupe Etat islamique au Grand Sahara (EIGS).
Le pays a connu dans la nuit du 4 au 5 juin l’attaque jihadiste la plus meurtrière depuis 2015, commise contre le village de Solhan (nord-est) et ayant fait de 132 à 160 morts selon les sources.
« Aucun espoir »
« Au regard des dernières évolutions macabres sur le plan sécuritaire, il était temps de donner un signal fort aux dirigeants pour se ressaisir et mesurer la gravité de la situation », a estimé Aristide Ouédraogo, membre de la société civile.
Interrogé au téléphone par l’AFP, un manifestant de la commune de Madjoari, dans l’Est du Burkina, a dit marcher « pour que les nombreux déplacés puissent retourner dans leur localités d’origine et vivre paisiblement ».
« Ça fait plus d’un an que cette commune est sous blocus des groupes armés, personne ne peut y entrer ou en sortir. La vie y est devenu chère et nous ne voyons aucun espoir venir des autorités », a-t-il ajouté.
Depuis l’attaque de Solhan, les manifestations de colère se multiplient.
Pour tenter d’y répondre, le président Kaboré, réélu en 2020 sur la promesse de ramener la paix dans son pays, à limogé mercredi les ministres de la Défense Chériff Sy et de la Sécurité, Ousséni Compaoré. Il assumera lui-même lui-même le poste de la Défense.
Selon le Premier ministre Christophe Dabiré, « l’attaque de Solhan a servi de détonateur parce que cela a permis de mettre en évidence un certain nombre de dysfonctionnements au niveau de notre dispositif de défense et de sécurité ». « C’est pourquoi le président Kaboré a repris les rênes du ministère de la Défense nationale (…) pour pouvoir procéder à une réorganisation interne de l’ensemble de nos structures chargées de la défense et de la sécurité ».
Il veut croire que cette décision permettra au chef de l’Etat « de renouer avec le peuple et de recréer la confiance indispensable pour assurer la sécurité des personnes et des biens ».
AFP
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