Deux jours après la publication d’un rapport d’Amnesty International mettant en avant la responsabilité de l’Etat marocain dans l’espionnage du journaliste Omar Radi, ce dernier a reçu, mercredi 24 juin, une convocation de la police marocaine. Il y est demandé au journaliste de se présenter, jeudi 25 juin à 10 heures (heure de Paris), à la brigade nationale de la police judiciaire, une unité de la direction générale de la sûreté nationale. Aucun motif à cette convocation n’a été précisé.
Dans la soirée, le procureur du roi du Maroc auprès la cour d’appel de Casablanca a confirmé cette convocation. Elle aura lieu, selon un communiqué, dans le cadre « d’une enquête sur son implication présumée dans une affaire d’obtention de financements de l’étranger, en relation avec des services de renseignement. »
Alerte : j'ai reçu une convocation écrite de la part de la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ). Je m'y rendrai demain matin. pic.twitter.com/hLuSOcdqQc
— Omar Radi (@OmarRADI) June 24, 2020
« Je trouve l’accusation du parquet absolument ridicule », a répondu Omar Radi, mercredi soir, dans une déclaration transmise au collectif international de journalistes Forbidden Stories – dont Le Monde fait partie. « C’est clairement lié aux récentes révélations d’Amnesty International et Forbidden Stories sur le fait que mon téléphone a été espionné par le Maroc à travers une technologie israélienne », affirme le journaliste marocain dans cette déclaration.
Inquiétude internationale
Omar Radi, journaliste et militants des droits de l’homme, condamné en début d’année au Maroc pour un Tweet critiquant la justice de son pays, a vu, en 2019, son iPhone être visé par une attaque informatique sophistiquée. Selon les constatations techniques d’Amnesty, seul l’Etat marocain était capable de mettre en œuvre cette attaque nécessitant un équipement extrêmement coûteux ou une collaboration des opérateurs téléphoniques.
Les autorités marocaines n’avaient pas souhaité répondre aux questions du collectif de Forbidden Stories, dont font aussi partie le Guardian, le Washington Post ou encore la Süddeutsche Zeitung, et à qui Amnesty International avait transmis ses conclusions.
Mercredi soir, Forbidden Stories, qui travaille sur la protection du travail des journalistes, se disait « très inquiet » sur Twitter, après l’annonce de cette convocation par la police marocaine.
Dans un entretien réalisé par le collectif au nom de tous les médias partenaires de ce travail d’investigation, Omar Radi avait violemment critiqué le rôle des autorités marocaines dans son piratage, soulignant une éventuelle responsabilité de la direction générale de la surveillance du territoire (DGST), un service de renseignement marocain. « Ils sont censés surveiller le territoire, mais ils interviennent aussi beaucoup dans le champ politique. Et ils révèlent la vie privée des gens, ils exposent d’autres, ils font s’entre-tuer d’autres. Ils font beaucoup de sale boulot, c’est un appareil de barbouzes », avait taclé le journaliste.
« Je n’ai peur de rien, j’y vais la tête haute. Mon but, c’est de révéler à travers mon journalisme les injustices et la vraie réalité du Maroc, et militer pour un Maroc meilleur en tant qu’activiste », réaffirme, mercredi soir, Omar Radi dans sa déclaration transmise après cette convocation.
Les experts d’Amnesty International ont notamment découvert, en examinant les traces laissées par l’attaque, les signes d’une implication de l’entreprise israélienne NSO. Cette dernière a annoncé se pencher sur les révélations de l’ONG.
courrier-arabe.com
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