Le multipartisme non limité a créé ou entretient l’anarchie en Guinée
Depuis le lacement des faux débats et des gesticulations inutiles sur le texte du 19 avril 2010 du CNT dite constitution parce que furtivement promulgué le 7 mai 2010 par un président issu d’un coup d’Etat militaire, et sur le référendum annoncé pour une constitution, on se pose la question de savoir si l’objectif visé par certains est l’intoxication du peuple avant la parution de ladite constitution en vue d’un référendum ou son information sur un texte non encore soumis à son appréciation et que même le premier ministre et son gouvernent n’ont pas encore feuilletée. On sent la jalousie, la haine et, plus grave, l’ethnocentrisme.
On raconte tout et son contraire. On se fait donneur de leçons de façon péremptoire. On lutte pour des intérêts et non pour des idées. On prend des positions définitives.
On prétend même parler au nom du peuple, alors que ce sont des individus qui ont créé des partis ou des organisations sociales dont certains ne regroupent que quelques membres au nom desquels ils parlent plutôt.
En effet, sur les 160 partis politiques agréés par le gouvernement, le peuple de Guinée n’a retenu que 15, parce que le proportionnel a été utilisé pour leur choix, afin de parler à son nom, mais seulement au sein de l’Assemblée Nationale.
Tous les autres ne peuvent représenter que leurs membres à compter, parfois, sur le bout de doigts malgré la gymnastique conceptuelle ou juridique à laquelle certains leaders se livrent de temps en temps dans les médias pour amuser la galerie..
Nous savons tous, du moins les citoyens de bonne foi, qu’un texte n’a un caractère fondamental (constitution ou loi fondamentale) que s’il a été adopté par le peuple suite à un référendum ou par une Assemblée nationale ou une assemblée constituante.
C’est pourquoi le peuple de Guinée n’a retenu, depuis 1958, que trois Constitutions.
La constitution du 12 novembre 1958
Pour appliquer la Loi-Cadre du 23 juin 1956, instituant la semi-autonomie dans les colonies françaises d’Afrique, les autorités coloniales françaises décident le renouvellement des mandats des conseillers territoriaux.
A l’issue du scrutin du 31 mars 1957, le PDG-RDA (Parti Démocratique de Guinée-Rassemblement Démocratique Africain) qui n’avait qu’un seul élu obtient 56/60 conseillers territoriaux, finalement 57, avec le ralliement du Conseiller indépendant de Dinguiraye, Tall Habib.
La DST (la Démocratie Socialiste de Guinée) d’Ibrahima Barry III remporte les autres 3 siège de Pita.
Le Bloc Africain (BAG) dirigé par Koumandian Keita, majoritaire dans la précédente assemblée, n’obtient aucun élu.
C’est cette assemblée territoriale qui existait au moment du référendum du 28 septembre 1958.
Pour déjouer la politique d’isolement entreprise par la France, surtout au niveau de l’ONU, soi-disant que le nouvel Etat n’a même pas une constitution alors qu’il sollicite son admission à cette organisation, les nouvelles autorités guinéennes durent prendre un certain nombre de mesures, en particulier l’érection, dès le 2 octobre 1958, de l’Assemblée territoriale renouvelée en Assemblée nationale constituante et la mise en place, en son sein, d’une commission de 15 membres chargée d’élaborer une constitution.
En sa première session du 10 novembre 1958, l’Assemblée nationale constituante adopte la première constitution qui est promulguée le 12 novembre 1958.
L’un des arguments essentiels de la France coloniale pour empêcher l’admission immédiate du nouvel Etat guinéen au sein du concert des nations indépendantes est ainsi balayé.
La seconde constitution, du 14 mai 1982
Elle traduit le passage du régime politique d’alors à la phase du Parti-Etat (fusion des structures du parti avec celles de l’Etat) sous la Première
République.
La troisième constitution, du 23 décembre 1990
Le 3 avril 1984, c’est le premier Coup d’ Etat militaire. Du régime à vocation socialiste, la Guinée opte pour le régime libéral qui nécessite une nouvelle constitution. Les membres du CMRN (Comité militaire de redressement national) mettent en place le CTRN (conseil transitoire de redressement national) chargé d’élaborer une nouvelle constitution.
Pour faire du projet un texte sacré ne devant souffrir d’aucune modification sans le consentement du Peuple, le projet est soumis au référendum le 23 décembre 1990 ; adopté à une écrasante majorité, la troisième constitution prend le nom de Loi Fondamentale de la République de Guinée.
Modification partielle acceptée par le peuple
Alors qu’il était élu le 19 décembre 1993 pour deux mandats de 5 ans chacun comme prévu par la Constitution, le général Lansana Conté décide, en plein second mandat, de supprimer la limitation d’âge et du nombre de mandat présidentiel ; malgré la protestation de l’opposition au sein du MORAD (Mouvement contre le Référendum et pour l’Alternance Démocratique), les « préoccupations » de l’Union européenne et les menaces des Etats Unis d’Amérique, le projet, soumis au référendum du 11 novembre 2001, fut adopté et s’imposa à nos partenaires au développement.
Ce qui permit au Général Lansana, Conté Chef de l’Etat, de briquer son troisième mandat et de l’emporter le 21 décembre 2003.
La crise de 2008 accouche d’un texte illégitime et illégal
Suite au coup d’Etat du 23 décembre 2008, l’anarchie politique s’installe en Guinée. Etant finalement neutralisé, le CNDD (Conseil national de transition) présidé par le capitaine Dadis Camara, est mis de côté.
C’est l’accord de sortie de crise de Wagadougou (Burkina Fasso), le 15 janvier 2010, avec la mise en place du CNT (Conseil national de transition) chargé de procéder à la révision de la Loi Fondamentale du 23 décembre 1990, qui permit l’accalmie.
Mais au lieu de le soumettre à un référendum comme le souhaitaient le Premier ministre de la Transition, Jean-Marie Doré, et d’autres citoyens, le projet adopté par le CNT est furtivement promulgué le 7 mai 2010 par décret du Président de la transition.
Le témoignage intéressant d’un leader politique
Ce que j’ignorais personnellement en partie m’a été récemment révélé par le Président du PDN :
- Ce ne sont pas les militaires qui ont imposé le CNT, mais les partis politiques, la société civile et les syndicats.
- Les candidats au premier tour des élections présidentielles s’étaient tous mis d’accord que celui qui serait élu soumettrait le projet du CNT à un référendum dans les six mois.
- Ce que reproche le président du PDN au Président élu, Alpha Condé c’est de n’avoir pas respecté cet engagement.
Que peut-on penser de ces trois affirmations ?
- Ceux qui ont créé le CNT, auteur d’un projet de constitution, savaient donc eux-mêmes qu’ils ne représentaient pas le Peuple de Guinée et que le projet de constitution élaboré par les membres de cette structure non confirmés par le peuple, n’était pas légitime.
- Les candidats aux élections présidentielles, tous se réclamant de la démocratie à l’époque, savaient donc que la promulgation furtive du 7 mai 2010 de ce projet ne conférait aucune une légitimité au texte adopté surtout que ce n’est pas le peuple qui avait choisi le président de la Transition.
Ne dit-on pas souvent que c’était pour vite chasser les militaires du pouvoir que les choses ont été précipitées ?
C’est certainement pour quoi tous les candidats avaient convenu qu’au bout de six mois, celui qui serait élu soumettrait le projet du CNT à un référendum.
- Or, entre le premier et le second tours, il s’est passé une longue période d’attente (27 juin-19 septembre 2010); Chacun des
deux candidats qualifiés pour le second tour en a profité pour s’affairer autour des alliances afin d’obtenir le maximum de voix, les suffrages obtenus au premier tour (40% et 18% ) ne comptant plus.
Ainsi, au second tour grâce à ce jeu d’alliances, le professeur Alpha Condé fut élu démocratiquement.
- Mais au lieu des six mois convenus, nous pensons que, comme tout homme d’Etat patriote, conscient et responsable, l’élu prit tout son temps pour confronter le texte du CNT à l’épreuve du temps, des réalités nationales et de l’exercice du pouvoir.
- Depuis lors, pourquoi aucun des candidats des élections présidentielles de 2010 ne l’a dénoncé pour le non-respect de leur engagement ?
Comme on dit dans ce cas, la responsabilité est partagée.
Le référendum, une obligation démocratique
Tout le monde sait ce qui motive ou sous-tend toute cette agitation, toute cette intoxication, toutes ces prises de position à l’emporte-pièce…
Mais puisque le Président Alpha Condé ne dit pas qu’au lieu du référendum promis à la veille du premier tour de 2010, il va nous imposer une constitution par décret, pourquoi rejeter ou s’opposer à la consultation du peuple sur ce qui va constituer sa loi fondamentale, la loi qui va la régir ?
Ce sont ceux qui s’opposent à cette consultation bien avant que sa date ne soit fixée et qu’on ne sache même pas ce que le projet contient, qui veulent s’arroser le droit de parler ou d’agir au nom du peuple ; ce sont eux qui sont, soit des vrais ou des apprentis dictateurs, soit des anarchistes indécrottables profitant de toutes les occasions confuses pour troubler l’ordre public.
Comme je l’ai démontré dans mes premiers articles (X), je suis d’autant plus déterminé et à l’aise pour défendre le principe cardinal de la démocratie multipartite, le référendum, que je n’ai cessé de le faire depuis la violation, en septembre 1991, de la première formulation de l’article 95(deux partis) de la loi Fondamentale du 23 décembre 1990.
Pour moi, tout ce que le peuple fait ou veut est bon ; tout ce qu’on lui impose est mauvais. C’est pourquoi je milite pour sa consultation préalable pour tout ce qui le concerne, en particulier le référendum annoncé pour une constitution, surtout qu’on débattra du projet avant la date du référendum, durant la campagne ad hoc ; chacun sera alors libre de choisir calmement le non ou le oui.
Le peuple de Guinée est un peuple mûr, pacifique qui n’a pas besoin de l’anarchie, de la provocation incessante et du désordre pour se conscientiser. Civilisons les débats. Il y va de l’intérêt de son intérêt.
Toute autre position, surtout partisane, nous paraît de la dictature ou de l’anarchie voulue…
El hadj Sidiki kobélé Keita
X
- Pourquoi la « constitution » du 7 ma 2010 ne peut-être un texte de référence ?
- Il ne s’agit pas de modifier une constitution imposée par décret, mais de sanctifier démocratiquement une constitution par référendum.