Les statistiques des liquidations et des faillites au mois d’avril en Afrique du Sud, publiées par l’institut national « Stats », brossent un tableau très sombre. Le nombre de liquidations d’entreprises a augmenté de 53,1% entre avril 2018 et avril 2019. Quant au nombre de faillites, il a augmenté de 30,1% entre mars 2018 et mars 2019.
L’économie connaissant une faible croissance de 1% à 2% depuis quelques années, il est fort peu probable que cette croissance soit due à la création d’un plus grand nombre d’entreprises. Il sera prudent de prendre en considération ces chiffres au sérieux. L’Afrique du Sud devient une destination de plus en plus difficile pour faire des affaires à cause du fardeau réglementaire et fiscal. Des politiques telles que l’EWC (Expropriation Sans Compensation) ne feront qu’augmenter les risques d’exploiter une entreprise en Afrique du Sud.
Laisser les entreprises créer de la richesse
Ceci dit, l’Afrique du Sud semble toujours être potentiellement une bonne destination pour les investissements. Toutefois, à certains égards, elle possède la pire combinaison de facteurs qui existe dans les pays en développement et les pays développés: l’industrie de pointe et les services financiers ainsi que des poches de sous-développement. Cela signifie qu’une grande partie du fruit des investissements à portée de main a déjà été cueillie. Pour développer davantage l’économie, nous avons besoin d’investisseurs prêts à risquer leur argent sur un marché émergent pour des rendements inférieurs aussi bien à ceux d’autres marchés émergents que des marchés développés.
Au niveau des politiques gouvernementales, l’environnement d’investissement devrait être aussi attrayant que possible. Il faut aller plus loin dans la déréglementation économique que de nombreuses autres économies concurrentes. Sinon, les entreprises qui ont dû fermer leurs portes ne seront pas remplacées par de nouvelles. Le gouvernement devrait utiliser des indices comme celui de liberté économique (EFW) du Fraser Institute pour s’en inspirer dans l’élaboration de ses politiques. D’autres indices, tels que l’indice de compétitivité, l’indice de facilité de faire des affaires (Doing Business de la Banque Mondiale) et l’indice de perception de la corruption (Transparency International), peuvent être utilisés. Evidemment, ce n’est pas que l’index de liberté économique qui peut mesurer l’efficacité des politiques, mais dans le but de générer plus de croissance économique et créer plus d’emplois, c’est l’outil idoine. Aussi, c’est la première place mondiale dans cet indice qu’il faut viser, en délogeant des économies telles que Hong Kong et Singapour. Cela conduirait vraisemblablement à un taux de croissance économique et d’emploi jamais atteint en Afrique du Sud. Il y aurait alors plus de créations que de fermetures d’entreprises. Cela nous permettrait de regagner notre place parmi les pays à forte croissance économique dans le monde.
Sortir des discours, passer à l’action
Le président Ramaphosa vient d’être réélu à la présidence du pays. Bon nombre des réglementations qui gênent le fonctionnement des entreprises relève du pouvoir de l’exécutif, car les lois en vigueur donnent aux bureaucrates et aux ministres de larges pouvoirs en matière de réglementation. Le président lui-même, lors d’une conférence des investisseurs après les élections, a déploré le fardeau réglementaire imposé aux Sud-Africains.
S’il s’agit de plus qu’une simple rhétorique, nous nous attendrions à ce que le président et son nouveau cabinet commencent à apporter les changements qui sont à leur portée. Nous avons déjà vu des signes encourageants avec l’annonce que la NERSA (régulateur national de l’énergie) commencerait à accorder des licences de production d’électricité pour les entreprises privées, à raison de 1 à 10 MW par projet. C’est un bon signe et cela atténuera sûrement certains de nos problèmes d’
approvisionnement en électricité, mais il devrait être suivi d’autres initiatives plus audacieuses.
La priorité devrait être de traiter les dysfonctionnements grevant l’efficacité du marché du travail. Plus les entreprises ont du mal à fonctionner, plus le pays perd d’emplois. La création d’emplois est liée à la création d’un environnement favorable aux petites entreprises. Le gouvernement doit prendre des mesures décisives pour commencer à démanteler les politiques du travail régressives. On peut faire quelque chose à cet égard au niveau réglementaire en commençant à exempter les petites entreprises et certaines catégories d’emplois du salaire minimum national (NMW), par exemple. Au lieu de simples rabais, le ministre du Travail peut plutôt offrir de véritables exemptions, comme le prévoit la loi.
Enfin, j’espère qu’il est clair pour tous que le président et son cabinet disposent des pouvoirs nécessaires pour entamer la déréglementation de l’économie. L’augmentation choquante des liquidations et des faillites devrait inciter les responsables gouvernementaux à agir, compte tenu du fait que 38% soit 9 994 000 sud-africains sont au chômage. Les politiques qui incitent à l’irresponsabilité budgétaire telles que celles de la couverture maladie universelle qui peut sembler attractive mais démesurée dans le contexte, ne feront que rendre encore plus difficile le fonctionnement des entreprises.
Mpiyakhe Dhlamini, analyste pour The Free Market foundation
Article publié en collaboration avec Libre Afrique.