Sur RFI Cellou Dalein parle de la Nouvelle Constitution en Guinée : «Les consultations ne sont qu’une formalité»

Hier, le ministre-conseiller du président Alpha Condé qui défendait le projet d’une nouvelle constitution. Aujourd’hui, RFI donne la parole au chef de file de l’opposition guinéenne, Cellou Dalein Diallo. Il a décidé de ne pas répondre à l’invitation du Premier ministre pour les consultations et il considère que la date annoncée pour les prochaines législatives, le 28 décembre prochain, n’est pas tenable. Il répond aux questions de Laurent Correau.

RFI : Ce lundi [16 septembre], vous n’êtes pas venu participer aux consultations organisées par le Premier ministre guinéen. Pourquoi ?

Parce que nous savions déjà que monsieur Alpha Condé a pris la décision d’introduire une nouvelle Constitution pour pouvoir s’octroyer un troisième ou un quatrième mandat, donc les consultations n’étaient qu’une formalité qui ne pouvait rien changer.

La présidence, de son côté, affirme que la nouvelle Constitution n’est pas destinée à servir un projet de troisième mandat. Qu’est-ce qui vous persuade du contraire ?

Vous vous êtes posé la question de savoir pourquoi il a attendu à la fin de son deuxième mandat pour changer de Constitution. Il aurait dû laisser cela à son successeur et tous les changements qu’on souhaite introduire peuvent faire l’objet d’une révision. Ce qui n’est pas révisable c’est les dispositions relatives à la durée et au nombre de mandats du président de la République.

Vous pensez qu’une révision de la Constitution serait préférable à un changement de Constitution ?

Oui absolument, parce que si son intention était de changer des discussions sur le mandat de collectivité, notamment la participation des femmes et de la diaspora, il aurait dû introduire une loi portant révision de la Constitution actuelle. Mais ce qui l’intéresse, c’est le troisième mandat. Cela ne peut pas se faire parce qu’on a veillé justement à la limitation du nombre de mandats du président de la République.

Lors d’une réunion de l’opposition plurielle qui a eu lieu ce lundi, les échanges autour de ces consultations ont été houleux. Certaines personnalités ont indiqué qu’elles voulaient participer au dialogue parce que selon elles, il s’agit d’un exercice démocratique. Qu’est-ce que vous leur avez répondu lors de cette réunion ?

Nous avons dit que toute consultation, tout dialogue relatif à un changement de Constitution n’est pas légal. On ne peut pas changer la Constitution. La Constitution n’a pas prévu une disposition qui permet de changer de Constitution. Cette Constitution ne peut pas être jetée dans la poubelle et d’adopter une nouvelle Constitution.

Mais est-ce que cela ne fait pas partie des prérogatives du président de la République de pouvoir proposer un nouveau texte de Constitution ?

S’il n’y a pas de rupture dans le fonctionnement des institutions, il n’y a pas de coup d’État. Il ne peut pas changer toute la Constitution. Il peut changer toutes les dispositions sauf les dispositions dites intangibles : la forme républicaine de l’État, la pluralité politique et syndicale et le nombre et la durée de mandat du président de la République.

Est-ce qu’il y a une ou des conditions auxquels l’opposition et la société civile sont susceptibles de participer à ces consultations ?

Non, on ne peut pas discuter du changement de Constitution. C’est illégal. On ne peut pas participer à un exercice illégal.

Mais est-ce que « la politique de la chaise vide » sur un tel projet constitutionnel ne va pas poser
problème
 ? Est-ce que cela ne risque pas de préparer les crises à venir ?

Nous sommes de républicains, des légalistes. C’est entrer dans un exercice tout à fait illégal que d’aller discuter des modalités de changement de la Constitution. Votre interlocuteur de ce matin vous dit que ce n’est pas sur le principe, c’est sur le contenu qu’il faut discuter.

L’autre dossier politique important à l’heure actuelle ce sont les législatives. Le président de la Céni, Salif Kébé, propose que ces élections aient lieu le 28 décembre prochain. Est-ce un objectif qui vous semble une bonne chose ?

Ce n’est pas un objectif réaliste,. Le président de la République a demandé à ce que les élections aient lieu d’ici la fin de l’année. Tous les experts électoraux sont unanimes, que c’est impossible d’organiser une élection régulière en décembre. La date la plus proche si on veut organiser une élection crédible et transparente, c’est au début du mois de mars. Les commissaires de la Céni ont fait l’exercice. Ils avaient dit qu’il fallait 235 jours pour pouvoir organiser des élections législatives lorsque les moyens auraient été mis à leur disposition. Aujourd’hui, Alpha [Condé] a donné des instructions : il faut que ces élections aient lieu avant la fin de l’année. Salif Kébé a dit : « Bon, on peut le faire ». Le 28 décembre, c’est impossible pratiquement.

Pourquoi cette date n’est-elle pas tenable selon vous ?

C’est parce qu’il y a des délais légaux qu’on ne peut pas réduire. Ce serait violer le code électoral. Il y a des délais opérationnels et impossible d’enrôler 6,4 millions d’électeurs seulement dans un délai de 45 jours. Or, l’application des recommandations de la mission d’audit demandait à ce que tous les électeurs reviennent pour se faire enrôler correctement parce que vous devez savoir que le rapport d’audit a trouvé que 3 millions d’électeurs sont dans le fichier alors qu’ils n’ont pas fait l’objet de dédoublonnage. Il y a 1,6 million d’électeurs qui n’ont pas de données biométriques. Il faut changer tout cela. Or, pour résoudre le problème du fichier, il fallait que tous les électeurs reviennent sans résister correctement confirmément au cahier de charge dans le fichier biométrique un service comme cela se doit, ce qui n’est pas le cas actuellement dans le fichier.

Si sa date n’est pas tenable pourquoi selon vous est-ce que les autorités se sont-elles fixé cet objectif ?

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