Tout a commencé en 2003, à Ouagadougou, quand Hawa Dramé crée la Fondation internationale Tierno et Mariam (Fitima) exclusivement consacrée aux myopathes.
L’établissement que Hawa Dramé a créé est le premier du genre en Afrique de l’Ouest. Il porte les prénoms de ses enfants, morts tous les deux de la maladie des muscles. Cette mère courage a alors décidé de consacrer sa vie à ceux que le terrible syndrome a estropiés. Les rudes épreuves, elle connaît. Son père, Alioune Dramé, qui fut le premier ministre des Finances de l’histoire de la Guinée, est mort au camp Boiro en 1978. Elle n’avait que 15 ans. La vie l’a pour ainsi dire préparée à aimer et à comprendre les myopathes. Et comme par hasard, elle dispose de la compétence nécessaire pour les soutenir.
Un parcours peu commun
Après une maîtrise de biochimie (option microbiologie-génétique), elle travaille sur la malnutrition humaine dans un laboratoire de l’hôpital Bichat et soutient sa thèse à Paris-VII. Elle décroche ensuite un diplôme en sociobiologie, un autre en marketing social avant de se perfectionner en informatique à l’École polytechnique féminine de Sceaux. Tout cela, bien avant de se marier et de faire des enfants !
Une approche originale de la maladie
La myopathie n’est pas une simple maladie physique, c’est aussi une maladie sociale. Elle s’en rendra vite compte. Fitima
Une vie de combat
Fitima commence petit comme toutes les entreprises de longue haleine : dix pensionnaires, deux collaborateurs dans un petit local loué à peu de frais. Aujourd’hui, elle dispose de ses propres locaux, accueille 50 pensionnaires par an et emploie une quinzaine de personnes. Au total, depuis sa fondation, plus de 1 000 candidats ont bénéficié de ses services. Aujourd’hui qu’elle a un nom, que sa réputation est largement acquise, on vient la consulter du Mali, du Niger, de la Côte d’Ivoire et même parfois du Bénin.
Ce bon sillon derrière elle, Hawa Dramé crée en 2009 le Roamy (Réseau ouest-africain de la myopathie) qui regroupe des spécialistes de six pays dont le but est de sensibiliser l’opinion aux problèmes de la myopathie et de spécialiser un nombre suffisant de médecins et d’infirmiers à son traitement. Et en 2010, elle installe une seconde Fitima à Conakry. Les candidats se bousculent aussitôt au portillon. Hélas, les places sont rares : 50 par an tout au plus. Le handicap coûte cher, et pas seulement sur le plan moral. La machine n’aurait pas tourné sans le soutien technique ou financier de mécènes comme l’AFM-Téléthon (l’Association française contre la myopathie), la DCC (Délégation chrétienne pour la coopération), la BOA, la BNP et la Société générale.
Les moyens sont limités, le travail abattu,
néanmoins, immense. Hawa Dramé compte aller plus loin, mais avec la prudence et le discernement que requiert un sujet aussi délicat. Peut-être, bientôt, une Fitima au Mali (le pays est demandeur). Ce qui serait un simple retour aux sources pour cette Guinéenne dont les ancêtres sarakolés ont quitté le Nioro au XIXe siècle pour s’installer au Fouta-Djalon.
Par Tierno Monénembo, in Le Point