La CEDEAO, une Communauté des Peuples ou un Club des Chefs d’Etat ?
La CEDEAO déçoit. Elle ne répond pas aux attentes et aspirations des peuples de l’espace Ouest-Africain. Son attitude face aux différentes crises qui secouent la Sous-Région le montre à suffisance.
Le Mali. La CEDEAO est responsable du coup de force intervenu au Mali. Elle a manqué d’anticipation. Elle a agi en syndicat de Chefs d’Etat, dans un esprit partisan et un acharnement insensé à sauver le fauteuil d’avance perdu d’Ibrahima Boubacar Keita. Elle s’est de ce fait engluée dans des propositions contreproductives, les unes que les autres, favorisant l’intervention des militaires. Une meilleure appréciation de la situation de sa part aurait pu favoriser une sortie honorable de crise pour tous.
La Côte d’Ivoire. La crise électorale de 2010, dans ce pays, hante encore les esprits par l’ampleur des dégâts qu’elle a produits sur ce pays et ses voisins. Plus de 3000 morts. Une tragédie humanitaire sous-jacente pour toute la Sous-Région. Une saga judiciaire encore loin de trouver son épilogue.
Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Victime hier d’exclusion sur fond de tripatouillage de la Constitution, Alassane Ouatara se complait aujourd’hui à tordre le cou à la Constitution ivoirienne pour briguer un 3ième mandat au prix du sang de ses compatriotes. Des manifestants sont tués, blessés et privés de liberté. La Cédéao n’en a cure, elle laisse faire syndicalisme oblige.
La Guinée. L’exemple guinéen est de loin le plus symptomatique de la Sous-Région en matière de mauvaise gouvernance. Dix ans de recul. Une paupérisation de la population indescriptible. Plus de deux cent personnes tuées, victimes de la répression sauvage des manifestations politiques depuis 2011. Des centaines de blessés, de nombreux handicapés à vie, des dizaines de détentions arbitraires. Des vagues de jeunes désespérés jetés sur la route de l’aventure avec ses conséquences désastreuses.
Un pays où le paysage institutionnel se résume à la seule Présidence de la République qui a phagocité toutes les autres institutions. Un pays sans Constitution par un fait extraordinaire de gangstérisme au vu et au su de tous et aussi de notre fameuse CEDEAO, à laquelle le respect de l’ordre constitutionnel semble être si cher.
Il y a peu, un simulacre de double élection législative et référendaire a été organisé ; auquel aucune institution nationale sérieuse, et/ou internationale ne s’est associée. Pas même la fameuse CEDEAO. Une pire mascarade est en préparation au titre de la Présidentielle pour le 18 octobre prochain. Nul autre acteur politique ou social du pays n’est situé sur le mystère tenant lieu de fichier électoral de cette supercherie, en dehors du Président de la CENI et de son mentor.
Une mission d’expertise électorale de la CEDEAO est arrivée à Conakry. A quelle fin ? Attendons de savoir ! Mais, en toute logique, l’heure n’est pas à l’élection en Guinée. Une concertation doit impérativement et urgemment s’ouvrir pour combler le déficit de dialogue entre les acteurs sociopolitiques, pour à minima, régler la question basique du fichier électoral, indispensable à la tenue d’une élection apaisée.
On ne le dira jamais assez. Toute élection déroulée dans les conditions qui sont actuellement celles de Guinée, créera plus de problèmes qu’elle n’en résoudra.
Que Dieu nous en préserve. Aameen !
Sény Facinet Sylla, Ex. Secrétaire Général Adjoint des Affaires Religieuses