Guinée : début de la campagne et interdiction de manifester
Malgré la Covid-19, les candidats à la présidentielle du 18 octobre ont le droit d’organiser des meetings populaires. Mais pas le Front national de la défense de la Constitution, qui boycotte le scrutin.
La campagne électorale en vue du premier tour de l’élection présidentielle du 18 octobre démarre ce vendredi à minuit. Elle s’achèvera le samedi 17 octobre prochain. Douze candidats sont en compétition, dont Alpha Condé, le président sortant, ainsi que Cellou Dalein Diallo, le chef de file de l’opposition.
Le Front national de défense de la Constitution (FNDC) « invite le peuple de Guinée à se mobiliser massivement le mardi 29 septembre pour « faire barrage au coup d’Etat du président Alpha Condé qui brigue un troisième mandat.
« Notre mouvement citoyen appelle les populations de Conakry et ses alentours à une série de marches pacifiques qui débutent le mardi 29 septembre 2020 pour exiger le départ de M. Alpha Condé », a indiqué Abdourahmane Sanoh, le coordinateur national du FNDC.
Mais la manifestation a été interdite. Ce qui ne surprend pas l’écrivain guinéen Tierno Monénembo.
Selon lui, « ce paradoxe est permanent en Guinée. L’absolue volonté du pouvoir d’empêcher toute expression populaire par tous les moyens. Mais on sait très bien que le coronavirus est un peu une espèce de complice de la dictature en Guinée. Ça lui a permis de bloquer tous les rouages de la vie politique du pays. Et il a prorogé le couvre-feu pour encore deux mois. Evidemment, de l’autre côté, il y a les forces populaires qui veulent coûte que coûte s’exprimer. Donc, finalement, il y aura du clash. Comme d’habitude. »
En effet, quelques heures avant l’annonce des nouvelles marches du FNDC, le président Alpha Condé a prolongé d’un mois l’état d’urgence sanitaire en raison de la Covid-19. La Guinée officiellement recensé 10.111 cas de contamination et 63 décès.
L’état d’urgence s’est traduit par des dispositions comme la fermeture des frontières et des écoles, qui ont depuis été levées ou allégées. Mais aussi par des restrictions à la vie publique et aux rassemblements.
Il permet au chef de l’Etat guinéen de maintenir des mesures exceptionnelles dont l’interdiction des rassemblements, limités à 100 personnes.
Utilisation des moyens de l’État
Le Front national de la défense de la Constitution accuse également le candidat Alpha Condé d’utiliser les moyens de l’Etat pendant cette campagne électorale.
« Tous les cadres de l’administration publique sont généralement mis en congé. Et on leur demande d’aller dans leurs territoires respectifs pour faire la campagne du parti au pouvoir. On a même eu, à un moment donné, l’hélicoptère présidentiel qui a été mis à la disposition de certains ministres pour aller faire campagne pour le parti au pouvoir. La radio-télévision nationale consacre tout son programme à vanter les réalisations du président en exercice. Le contexte actuel ne nous permet pas d’aller à des élections apaisées, transparentes et crédibles », soutient Abdoul Gadiri Diallo, président de l’Organisation guinéenne des droits de l’homme (OGDH).
Le pouvoir réfute ces accusations
« Ce n’est même plus nous qui demandons aux Guinéens de voter pour notre candidat. Ce sont les Guinéens qui disent, s’il vous plait, quand est-ce qu’on vote ? On n’a même pas besoin de demander à un fonctionnaire ou à un administrateur public d’aller sur le terrain pour parader. Je ne sais pas si vous êtes au courant de l’expression, comment nous appelons aujourd’hui le président Alpha Condé ? C’est le candidat du peuple », répond Domani Doré, première secrétaire parlementaire à l’Assemblée nationale de Guinée et porte-parole du RPG Arc-en-ciel, le parti au pouvoir.
L’interdiction des rassemblements n’a pas empêché des partisans du
pouvoir d’organiser ces derniers jours d’importants rassemblements dans des salles closes ou sur la voie publique à Conakry et dans les villes de l’arrière-pays.