Un groupe de soldats mutins des forces spéciales guinéennes a annoncé, dimanche, en Guinée, la dissolution de la Constitution et du gouvernement, l’éviction du pouvoir du président Alpha Condé, la fermeture des frontières. Les putschistes ont également instauré un couvre-feu dans tout le pays.
En Guinée, des officiers des forces spéciales ont affirmé, dimanche 5 septembre, avoir capturé le chef de l’État Alpha Condé, dissous les institutions, pris le contrôle de Conakry et fermé les frontières. Les putschistes ont annoncé dimanche l’instauration d’un couvre-feu dans tout le pays « jusqu’à nouvel ordre » ainsi que le remplacement des gouverneurs et préfets par des militaires dans les régions.
Les militaires ont aussi dit convoquer les ministres sortants et les présidents des institutions à une réunion lundi à 11 h (locales et GMT) à Conakry, dans un second communiqué qu’ils ont lu dans la soirée à la télévision nationale.
Aucun mort n’a été rapporté dimanche, malgré les crépitements intenses d’armes automatiques entendus dans la matinée dans la capitale de ce pays coutumier des confrontations politiques brutales. L’apparent épilogue de plus de dix années de régime Condé a donné lieu à des scènes de liesse dans différents quartiers de la capitale.
« Nous avons décidé après avoir pris le président, qui est actuellement avec nous (…) de dissoudre la Constitution en vigueur, de dissoudre les institutions », dont le gouvernement, a dit, dans une vidéo, le chef des forces spéciales, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, au nom d’un « Comité national du rassemblement et du développement », au côté de putschistes en uniforme et en armes.
« Le président est avec nous, on tient tout Conakry »
Il a également annoncé la fermeture des frontières terrestres et aériennes de ce pays d’Afrique de l’Ouest plongé depuis des mois dans une grave crise économique et politique. Dénonçant la « gabegie », le lieutenant-colonel Doumbouya, enveloppé dans un drapeau guinéen, a promis d' »engager une concertation nationale pour ouvrir une transition inclusive et apaisée », dans une déclaration à la télévision nationale qui a brièvement interrompu ses programmes.
Dans une interview exclusive accordée à France 24, Mamady Doumbouya a également affirmé que ses hommes détenaient Alpha Condé. « Le président est avec nous. Il est dans un lieu sûr. Il a déjà vu un médecin », a-t-il déclaré. « On tient tout Conakry et on est avec toutes les forces de défense et de sécurité pour enfin mettre fin au mal guinéen », a-t-il poursuivi.
Les putschistes ont également diffusé une vidéo, non authentifiée, du président Condé entre leurs mains. Ils lui demandent s’il a été maltraité, et Alpha Condé, en jeans et chemise froissée dans un canapé, refuse de leur répondre.
Alpha Condé est en ce moment entre les mains des éléments du Groupement des Forces Spéciales de #Guinée.#Kibaro pic.twitter.com/OXyrtAoOZv.
— Pàppa Ismaayla Jeŋ (@aliamsi) September 5, 2021
« Les forces de l’ordre affirment que les frontières sont fermées, que la Constitution est dissoute. Dans quelques heures, ils mettront un gouvernement de transition en place. [Mamady Doumbouya] a exigé qu’on signale qu’ils ne sont pas là pour s’éterniser au pouvoir mais pour planifier une transition », a expliqué, dimanche, Malick Diakité, correspondant de France 24 à Conakry. .
Des tirs soutenus et des militaires dans les rues
Rien ne permettait d’affirmer dimanche soir que Mamady Doumbouya et ses hommes avaient pris le contrôle du pays. Le ministère de la Défense a initialement affirmé que la garde présidentielle avaient repoussé les « insurgés » quand ils ont tenté de prendre le palais présidentiel. Mais les autorités en place jusqu’alors ont ensuite sombré dans le silence.
Tôt dans la matinée, des tirs nourris d’armes automatiques avaient retenti sur la presqu’île de Kaloum, centre névralgique de Conakry, où siègent la présidence, les institutions et les bureaux d’affaires de ce pays d’Afrique de l’Ouest en proie depuis des mois à une grave crise économique et politique.
France24