Quand est-ce qu’il faut restreindre un droit de l’Homme ou une liberté fondamentale ?
Quand est-ce pouvons-nous parler de situation exceptionnelle ?
Deux questions qui méritent d’être éclairées dans le contexte sociopolitique actuel en République de Guinée.
D’une part, la restriction d’un droit de l’Homme ou d’une liberté fondamentale par exemple le droit de manifester, le droit à la liberté d’expression et d’opinion est subordonné à trois éléments :
- Lorsque le droit ou la liberté constitue une menace à l’ordre public
- Lorsque le droit ou la liberté constitue une menace à la sécurité nationale
- Lorsque le droit ou la liberté contribue à la violation d’un droit appartenant à une autre personne (Voir Ludovic HENNEBEL, Hélène TIGROUDJA, Traités du DIDH, p
72; Sadou Diallo, Le droit de l’Homme à la santé dans l’espace CEDEAO, Thèse, p 104)
Ainsi, lorsque les autorités estiment que ces trois (3) types de menaces sont présentes ou ont déjà été effectives sur le terrain, ils (dirigeants) ont le droit de déclaré le régime exceptionnel de la restriction des droits et libertés fondamentales. Il s’agit entre autres de l’état d’urgence et de l’état de siège.
Ce sont là les deux types de régimes exceptionnels qui légalement octroient aux autorités à déclarer la situation exceptionnelle dans un état de droit respectueux des droits et des libertés. Dans ce cas, tout acte pris par les autorités demeure légal conformément aux lois (constitutions et conventions de protections des droits de l’Homme.
Ce n’est que sous ces deux conditions qu’on peut parler de situation exceptionnelle. Tant que ces deux régimes ne sont pas décrétés, on ne saurait parler de situation exceptionnelle et mesure exceptionnelle.
Dans le cas actuel, les autorités nous font croire que nous sommes dans une situation exceptionnelle à cause du Coup d’État du 05 septembre 2021, ce qui n’est pas le cas puisqu’aucun des deux régimes d’exception n’est décrété.
Aucune disposition des textes législatifs et conventionnels des droits de l’Homme n’est soumise jusqu’à présent aux régimes d’urgence ou d’état de siège. L’état de droit produit ses effets et ne souffre d’aucune dérogation ou restriction légale.
La Dérogation ou Restriction légale s’analyse lorsque la légalité exceptionnelle remplace la légalité normale pendant une période déterminée. Ainsi, toutes mesures prises doivent être exceptionnelles et provisoires (Voir Sadou Diallo, Le droit de l’Homme à la santé dans l’espace CEDEAO, Thèse, pp 107-109 ; CJ-CEDEAO, affaire Simone et Michel GBAGBO, paragraphe 60 ; Commission.A.D.H.P c. Libye paragraphe 76)
La limitation ou la restriction doit viser essentiellement à protéger les droits des individus plutôt qu’à permettre aux États de les limiter. Ces restrictions doivent être conformes à la loi, compatible à la nature des droits protégés et imposée dans l’intérêt de buts légitimes, exclusivement en vue de favoriser le bien-être général dans une société démocratique. Cette limite doit être proportionnelle à l’objet (Voir Sadou Diallo, Le droit de l’Homme à la santé dans l’espace CEDEAO, Thèse, p 109).
Ainsi, pour qu’une situation exceptionnelle soit considérée comme légale, elle doit ainsi reposer sur le régime de l’état d’urgence et celui de l’état de siège.
C’est BASIQUE !
Donc, on ne saurait parler de situation exceptionnelle. Qu’ils (dirigeants) arrêtent de le dire.
La TRANSITION n’est pas un régime exceptionnel d’autant plus que nous sommes régies et gouvernés par des textes juridiques en vigueur et qui produisent des effets. Nous sommes dans une situation légale ou chacun peut se prévaloir de ses droits, les revendiquer et les exercer sans restriction tant que la situation de l’état d’urgence et de l’état de siège n’est pas décrétée. À cet effet, les actes administratifs (décret, arrêté du MADT et des maires) sont illégaux et peuvent faire l’objet d’attaque devant les chambres administratives de nos juridictions.
Dr Sadou DIALLO
Docteur en Droit public