Le 28 septembre 1958, il a dit préférer “la pauvreté dans la liberté”, mais au final les guinéens ont eu la pauvreté sans la liberté.
Nous, le Peuple de Guinée, avons subi la mise en place d’un système tordu et vicieux de délation national, instaurant la peur jusqu’au cœur des foyers familiaux.
Nous avons eu l’omniprésence des milices (JRDA et autres) de la police d’état et autres services secrets au service du ‘’Guide Suprême’’, le ‘’Stratège’’ omniscient, omnipotent et infaillible, qui s’était transformé en un criminel sadique et machiavélique.
Notre belle Guinée est très rapidement devenue une prison infernale à ciel ouvert, d’où on ne pouvait sortir que sur instruction expresse d’un Guide paranoïaque, affabulateur, complexé à souhait et mal éclairé.
Notre terre s’est métamorphosée en cimetière géant tant il y eut de charniers : En effet, avec l’aide de l’ONG américaine « Site of Conscience », l’Associations Des Victimes Des « Camp Boiro » (AVCB) en a déjà identifié et cartographié 14 à travers le pays.
Nos élites et nos cadres, tant admirés et enviés en Afrique francophone, ont été écrasés, anéantis, puis balayés, et on a fait table rase de centaines d’années d’histoire, au nom de la pseudo Révolution.
Nos paysans ont été appauvris et ont dû fuir à leurs risques et périls le collectivisme pour les pays voisins.
Combien de milliers de navétanes ont fui vers le Sénégal, vers le Mali, vers la Sierra Leone, vers le Libéria, vers la Côte d’Ivoire, et autres destinations… à la recherche d’un havre de paix et d’une pitance minimale ?
Les enfants de la république ont eu droit à une éducation au rabais, par le sabotage conscient et méthodique de l’enseignement dispensé dans le même pays en quatre langues différentes à travers les célèbres « koko-lala ».
L’enseignement aux étudiants des discours pompeux et creux que le Guide faisait rédiger en son nom, et l’organisation de la dépravation des mœurs à travers le système des ‘’Filles d’honneur’’ chargées de divertir, très souvent malgré elles, les cadres du parti en déplacement dans le pays, les concours de théâtres faisant l’apologie du régime et de son Guide, les compétitions sportives organisées pour empêcher la jeunesse de trop réfléchir, tout y est passé.
Nous avons tout eu au cours de ces 26 années de folie furieuse et aveugle. Et on nous dit aujourd’hui que celui qui est à l’origine de tout ce mal était un grand homme incompris !
Heureusement « vint la liberté, le 3 avril 1984 » grâce au courage du Comité Militaire de Redressement National « CMRN » qui a balayé le régime de Sékou Touré; ce Pouvoir qui avait pris en otage la Guinée et en avait fait sa propriété privée, sa chasse gardée. Désapprouver le régime faisait de vous un apatride, un anti guinéen.
Contrairement à toute la génération née après 1984, victime de mensonges d’état, nous autres étions là le 3 avril 1984. Nous avons rendu grâce à Dieu, le Roi des rois, nous avons dansé, chanté, rêvé.
Nous avons enfin eu la véritable liberté :
• Liberté de sortir voir le retard accumulé par la Guinée dans tous les domaines, et revenir au pays sans être inquiétés et accusés d’être des contre-révolutionnaires destinés à finir leurs jours au Camp Boiro en attendant de se retrouver dans une fosse commune ;
• Liberté de parler et agir, liberté d’entrer en politique et compétir contre le Président et son parti le « PUP », sans être accusé de comploter pour le compte de la France, du KGB, de la CIA ou même des SS nazi et finir au Camp Boiro comme traitre à la nation ;
• Liberté de penser et réfléchir à l’avenir de notre village, notre ville, notre pays ; prérogative jadis réservée aux familles régnantes qui se sont d’ailleurs illustrées par leur incapacité à développer la Guinée.
Mais d’après les thuriféraires et nostalgiques du régime, il paraitrait que nous avions des usines, des avions, des bateaux, une économie vibrante du temps du PDG de Sékou Touré, bonheur que les guinéens fuyaient par centaines de milliers au risque de leurs vies, pour aller vivoter dans les pays voisins. Nul n’est dupe: tout çà a dû disparaitre comme par enchantement avec la Liberté recouvrée comme au dernier jour d’un conte de fée ; les entreprises ivoiriennes, sénégalaises, maliennes, burkinabés elles ont survécu au temps, ont embauché les guinéens et ont exportés en Guinée notamment;
• Liberté d’entreprendre pour bâtir à partir des ruines fumantes laissées par le régime défunt ;
• Liberté d’aller se soigner à l’étranger auprès de meilleurs médecins formés en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Mali, en France, ou tout simplement aux USA comme le fit le Guide Suprême ; lui qui a torturé et fait exécuter des médecins, des pharmaciens, et autres personnels de santé et a laissé des hôpitaux crasseux devenus des mouroirs ; lui l’Africaniste fier et éloquent qui « aimait », disait-on, son pays et son peuple : en 26 ans de règne dans un pays qu’ils décrivent comme ayant tout, pourquoi ne s’est-il pas fait soigner dans les merveilleux hôpitaux de Guinée, ou tout au moins dans ceux des pays de l’Est, plutôt que d’aller mourir chez le chef de file de l’impérialisme international, les Etas Unis ?
• Liberté enfin d’aller rouler sur les grandes autoroutes bitumées d’Abidjan, Dakar, Lomé ou Paris ; trop contents que nous étions de découvrir ces joyaux du développement à quelques centaines de kilomètres de notre unique route infinie de l’histoire et de nos routes de latérite cahoteuses, poussiéreuses dont on nous disait du temps de la Révolution qu’elles étaient les meilleures d’Afrique. Ah la Révolution ! Que de mensonges ! Et ça continue de plus bel !
Malheureusement au fil du temps, comme c’est devenu la coutume en Guinée, à peine avions nous pris l’habitude d’apprécier ces nouvelles libertés obtenues le 3 avril 1984, que l’Histoire nous rattrapa et nous rappela que Sékou Touré avait promis et formé le Guinéen Nouveau à son image avant de mourir; et que ce Guinéen Nouveau a continué à répandre le sang des guinéens, à promouvoir l’intolérance vis-à-vis des autres, et répandre la conviction qu’être au Pouvoir signifiait non seulement avoir un droit de vie et de mort sur tout le monde, mais aussi le droit de disposer seul des ressources que Dieu a placées dans le sous-sol et sur le sol guinéen, sans que Nul n’ait le droit de critiquer la manière dont la nation est administrée.
Pauvre Guinée ! Quand est ce que nous serons en mesure de nous débarrasser une fois pour toute, de ce cancer que représente l’héritage maléfique de Sékou Touré, qui a gangréné le corps social guinéen ?
Association des Victimes des « Camp Boiro » AVCB